Aure Séguier

100 poèmes du rêve aux larmes

2005, ed. Le Manuscrit

Recueil de poésies écrite par Aure entre ses 14 ans et ses 19 ans. Cinq ans de rêves et de larmes résumés en cent poèmes.

Résumé

Cinq ans de la vie d'une adolescente couchés sur du papier, cinq ans de rêves et de larmes résumés en cent poèmes. Des joies de la découverte de l'amour au désespoir le plus profond, en passant par des réflexions sur des personnes ou des paysages rencontrés dans ce long cheminement à la recherche de sa personnalité, l'auteur a tout confié à sa plume. C'est un cœur à la fois d'enfant et d'adulte qui est mis à nu dans ces pages, témoignant d'un monde parfois déconcertant.

Extraits

Autoportrait ou Vengeance posthume

Me voilà allongée sur un sol poussiéreux.
Vous qui êtes venus pour cracher sur mon corps,
Vous qui êtes venus pour contempler ma mort,
Placez-vous tout autour et ouvrez grand les yeux.

Voyez mon sang gicler de tout point de ma peau,
Voyez mon cœur ouvert et ses vaisseaux battants
Que tient une main gauche d’un rouge éclatant
Et ma chair déchirée d’où saillent quelques os.

Voyez mes intestins vides de tout espoir,
Mon cerveau répandu sur le pavé vermeil,
Mes yeux baignant dedans et luisant au soleil,
Et ma bouche éclatée qui déjà vire au noir.

Voyez-moi écorchée, lapidée, éventrée,
Restez là fascinés, cachant vos hauts le cœur,
Ne pouvant détacher vos regards de l’horreur,
De la bouillie de corps qui à tous est montrée.

Me voilà allongée sur un sol poussiéreux.
Vous qui êtes venus pour contempler mon corps,
Vous qui êtes venus pour cracher sur ma mort,
Osez donc m’approcher et me fermer les yeux.

L'arbrisseau en pleurs

Un petit garçon. Seul. Dans une crevasse noire. Il a peur et il pleure.
« Papa  ! »
Il est tout seul. Il regarde autour de lui mais ne peut rien distinguer, l’obscurité emplit partout. Les yeux grands ouverts et emplis de larmes, il essaie de toutes ses forces de voir. De voir ou de comprendre ? Mais comment comprendre l’invisible, comment voir l’incompréhensible.
« Papa  ! Viens  ! »
Il ne sait plus. Il a grandi d’un coup et c’est trop dur. Il ne s’est pas encore rattrapé. Il se cherche, mais est seul pour se retrouver.
« Papa  ! Viens m’aider  ! »
Il voit le long chemin devant lui, ou plutôt, le devine. Mais comment le gravir avec un seul appui ? Ses jambes sont trop petites, et c’est trop vaste  !
« Papa  ! Viens m’aider à grandir  ! »
Il se replie sur lui-même. Les larmes coulent sur ses joues. Il veut vider tout le sel de son corps. Ce n’est plus qu’une petite boule humaine secouée par les sanglots. Ce n’est pas juste. Tout son monde s’est effondré, il va falloir tout reconstruire et ses repères ont disparu. Il tâtonne dans sa vie. Pourquoi ? La haine le prend. Rien ne fait plus mal à entendre que les hurlements de colère d’un enfant déchiré.
« Papa  ! Papa  ! Viens m’aider à grandir… sans toi ! »

L'Arbalète

C’est un regard caresse qui a pris mon cœur,
Deux beaux feux de douceur qui irradient le monde,
Qui font couler la pluie sur mes anciens bonheurs
Pour m’en laisser voir un à la beauté de l’onde.

Tentée jusqu’au vertige, dessous mes paupières
Je cache un cri du corps que mon orgueil retient.
Sous son regard perçant, le mien ne peut que taire
Ce qu’il voudrait hurler dès qu’enfin il revient.

Ce sont des yeux tueurs aux airs d’enfant fragile
Qui ont touché mon cœur d’un poison assassin
Et l'ont rendu à eux avili et servile.

C’est un regard caresse qui dort en mon sein,
Un océan de feu dans lequel je me noie,
Ce sont deux yeux trop doux qui scintillent en moi.

© Aure Séguier 2024